L’immensité de l’univers : obstacle à la croyance au Dieu chrétien ?
Il semble que le Dieu biblique était parfaitement adapté à l’univers tel qu’il fut conçu jusqu’au XVIème siècle, un univers clos et relativement petit. Dans cet univers, la Terre était au centre, l’homme était le centre du centre…
Dieu s’occupait des hommes en priorité et avait envoyé son Fils unique parmi eux.
Aujourd’hui, lorsqu’on songe qu’il existe non pas 100 milliard de planètes, mais 100 milliard de galaxies, composées chacune de millions ou de milliards de systèmes solaires, autour desquels gravitent peut-être des millions de milliards d’exo-planètes, et que la Terre n’est qu’une planète parmi des millions de milliards d’autres planètes, ce récit est-il soutenable ?
Pourquoi Dieu, étant par hypothèse omniscient et tout-puissant, aurait créé autant de milliards de galaxies, si ce qui importe c’est seulement le destin de l’homme sur Terre ?
Le système solaire conçu par les Anciens était cohérent avec ce projet. Un univers de centaine de milliards de galaxie n’a plus aucun rapport d’échelle avec ce projet.
Alors, pourquoi ces galaxies ? Quelle est leur signification dans l’économie du salut – si elles peuvent en avoir une – et dans un plan divin ?
astronomie, vitesses galactiques…
En lisant cette discussion, j’ai immédiatement pensé au commentaire qu’avait eu Alphonse X de Castille alors qu’on lui exposait le système du monde :
« Si le Seigneur Tout-Puissant m’avait consulté avant de commencer la Création, j’aurais recommandé quelque chose de plus simple. »
Ce n’est pas d’aujourd’hui que l’on se pose cette question. Elle est trop vaste pour être traitée dans le cadre d’un forum. Il n’y a même pas d’indice crédible qu’elle puisse être traitée par l’esprit humain. Quand on regarde sur le temps long les manières que l’intelligence humaine a eu d’aborder le sujet, on est surtout surpris par l’infinie variété des réponses, du conte métaphorique aux arguties logiques.
Donc, comme chrétien, la question est donc moins de savoir le pourquoi ( et pourquoi quoi ? ) que d’approcher ce que l’infinité de l’univers peut nous apprendre. Cinci et Jeremy43 ont déjà répondu : l’humilité. Il n’y a pas d’indice crédible que cette question puisse être traitée par l’esprit humain, et rien dans l’enseignement du Christ ne porte sur la connaissance de l’univers.
On dirait une version cosmogonique du théorème d’incomplétude de Godel. Il n’est d’abord pas certain qu’en observant de l’intérieur un système on puisse acquérir une connaissance qui le transcende. Premier point. Second point : il n’est pas non plus certain que le raisonnement humain soit adapté pour celà.
Si la Tradition scolastique a fait un tel cas du langage des anges, c’est bien qu’il y avait conscience d’un besoin de médiation entre le divin et le matériel, et que l’enseignement du Christ prouve l’incarnation mais ne donne pas de chemin net pour l’élévation. Jamais le Christ ne nous a promis la connaissance de ce monde, ou que ce serait par le raisonnement que l’on serait sauvé. Il aurait plutôt donné des indications du contraire « Mon royaume n’est pas de ce monde »
Reste tout de même cette question, ‘pourquoi’, à laquelle il est difficile de résister. Moi le premier, qui ait toujours une théorie sur le feu et une autre au feu. Mais c’est qu’il n’est pas sûr que l’esprit humain puisse y répondre. Ce désir manifeste de trouver une réponse à toute question semble être une marque de notre manière de penser. Car, froidement réfléchi, quel besoin avons nous de ce pourquoi si profondément ancré en nous qu’il est une phase obligatoire de notre développement mental ?
L’esprit humain a besoin d’images – fussent elles mentales – pour comprendre les choses, mais il ne doit pas s’y arrêter. La carte n’est déjà pas le territoire pour les connaissances matérielles. Alors pour ce qui est de la connaissance de Dieu … Celà pointe, comme je le comprends, le nœud du problème : en subordonnant Dieu à notre système de connaissance ( sub – ordo, c’est à dire en le plaçant en dessous dans l’ordre de la connaissance ), on s’autorise à en faire une image mentale que l’on peut manipuler à souhait. C’est à dire qu’on enferme Dieu dans l’étroitesse de notre pensée.
Celà ne doit pas être un frein à la connaissance. c’est Guillaume Budé qui prétendait que la connaissance humaine permettait de s’approcher du divin comme un épervier monte vers le ciel, en cercles successifs. Je trouve la métaphore très juste, au sens que l’épervier n’a aucune preuve que l’éther puisse le porter jusque où il souhaite aller.
Quant à cette volonté de comprendre si chère à nous autres hommes modernes, elle ne vient pas du Christ, ni même de Budé, elle vient de Descartes.
Il y a avec Descartes une rupture avec la tradition chrétienne qui nous a conduit insensiblement à l’état actuel, c’est à dire une divinisation du raisonnement lui même ( préférer la méthode à l’objet ), et surtout cet étrange biais du raisonnement ‘je pense donc je suis’ qui m’avait intuitivement semblé biaisé. Ce n’est que maintenant que je comprends, et grâce aux travaux récents de la neurologie ce qui m’avait gêné. Ce ‘Je pense donc je suis’ sur lequel il appuie tout, que devient il quand dans le cerveau la conscience est la dernière informée de ce qui se passe ?
Pauvre Descartes, qui se sera à peu près trompé sur tout et que le temps envoie insensiblement à l’ornière. Car des animaux-machines au refus des résultats expérimentaux, si on lui enlève le cogito que reste t’il ? Quelques idées sur les lunettes ?
Il y a chez Descartes une hérésie voilée qui est de subordonner Dieu au raisonnement. L’idée innée de Dieu n’est pas loin de la pensée créatrice. Car quel besoin de Dieu, si tout ce que nous savons du monde provient de la pensée elle même. Il y a dans ce raisonnement un serpent qui se mord la queue. Il voulait rompre avec la scolastique par l’observation du monde, voilà qu’il s’enferme dans une méthode qui conduit à la virtualisation. C’est un travers solipsiste qui va nous conduire non pas non pas à révérer le Mystère, mais adorer les petits secrets, et finir yeux bandés un pied nu et une manche défaite à réfléchir dans un cabinet de connaissance rose Croix à croire que la Vérité est quelque part par là, et que ces gens qui ne nous disent rien sont riches de connaissance et de sagesse. Bon vieux truc des mystificateurs.
Oh comme il est dur de s’en tenir à la simple acceptation de notre humilité et de notre impuissance. Ces choses que nous croyons tenir si fermement nos pensées, nos certitudes sont choses mouvantes. Nous ne sommes pas Dieu. Nous ne pouvons pas même nous mettre à sa place ou tenter d’inférer Ses Pensées.
Tout ce que nous pouvons faire, c’est poursuivre notre chemin, accrochés à l’enseignement du Christ, tenter de nous élever, de comprendre. Mais combien de fois déjà l’humanité a t’elle construit des systèmes de connaissance qu’elle a ensuite rejeté comme mirages ?
Dieu ne se peut être enfermé ni dans notre imagination, ni dans notre raison.
Pour s’élever, il faut avoir en permanence devant les yeux la limite de toute connaissance humaine. Situation inconfortable, très frustrante, et qui fait que nous avons renoncé à la recherche pour la certitude, et le confort rassurant , la technologie virtualisée plutôt que la science.
C’est à dire que pour être un vrai scientifique, il faut être chrétien.
« Rien ne vient de rien » ou Le néant
Ex Nihilo Nihil fit (latin de : rien ne vient du néant) : cette célèbre maxime reprend une vérité intuitive que nul être sensé ne saurait ignorer ou dénier, rien ne peut provenir du néant. Le néant ne peut rien créer , ni matière ni vie peuvent surgir du néant. Cette vérité logique est à noter car elle constitue une base de raisonnement lorsqu’on examine l’existence du créateur à la lumière des faits et des observations.
Il ne faut pas confondre néant et vide qui sont deux notions différentes. La seconde est relative à la notion d’espace (le vide s’inscrit dans un espace), elle-même incompatible avec la notion de néant (au sens de rien absolu). Le néant n’est pas le vide, et réciproquement. Le vide est l’absence de matière dans un espace défini. Le néant étant l’absence d’existence, la conception même d’espace devient obsolète (ex. avec une pompe à vide, vous pouvez retirer la matière — y compris l’air — d’un bocal). Le vide décrira alors cette absence. Le néant étant à l’existence ce qu’est le vide à la matière, il faudrait que l’espace même que « contient » le bocal n’existe pas, il serait donc impossible au bocal d’exister.
>CEC 318 Aucune créature n’a le pouvoir infini qui est nécessaire pour » créer » au sens propre du mot, c’est-à-dire de produire et de donner l’être à ce qui ne l’avait aucunement (appeler à l’existence ex nihilo) (cf. DS 3624).
Notre Créateur a donné “l’être à ce qui ne l’avait aucunement“.
Stephen Hawking : En raison de la loi de la gravité, l’univers peut se créer de lui-même, à partir de rien.
L’univers ne peut pas produire et donner “l’être à ce qui ne l’avait aucunement“. On sait que l’univers ne peut pas produire et donner l’être à l’énergie “qui ne l’avait aucunement“.
[C’est un simple glissement sémantique. Quand nous parlons de raison, nous parlons d’explication, et la science ne se fonde pas seulement sur des « conséquences ». Que tout ait une explication est un postulat sans lequel aucune science n’est possible, si le principe de raison suffisante n’est pas vrai, toute tentative de démontrer par induction/abduction/autre perd son intérêt. Mais ce relativisme là évoque une contradiction par rapport à la vision tranchée des lois scientifiques. Ce postulat n’est abandonné que pour la question du divin. La question de l’univers infini ou en boucle n’échappe pas à la contingence, et la référence condescendante à Marx est hors de propos. Si le P.R.S. est une « croyance irrationnelle », alors quelqu’un qui croit en la cohérence du monde (en faisant de la science par exemple) est également bercé d’illusion.]